La ronde des témoins s’est poursuivie ce matin avec à la barre un témoin qui n’était ni sur le théâtre des opérations, ni même au pays au moment des faits. Mais, n’ayant pas voulu collaborer avec les nouveaux maîtres, il sera arrête et incarcéré. Lui, c’est Bassirou Sanogo. Journaliste de formation, il était l’ambassadeur du Burkina en Algérie et un proche du « père de la Révolution ». Certainement, c’est cette proximité avec Thomas Sankara qui lui a coûté chère.
Pour les faits, Bassirou Sanogo est très amer.
En effet, après l’assassinat de Thomas Sankara et de ses compagnons d’infortune, Bassirou Sanogo souligne qu’il a été convoqué en novembre 1987 avec près d’une vingtaine d’ambassadeurs et de chargés d’affaires à Ouagadougou. Et c’est à cette occasion que Jean Marc Palm alors ministre des relations extérieures leur a livré les mobiles du coup d’Etat du 15 octobre 1987. « A cette rencontre, j’ai particulièrement posé une question. J’ai demandé si on était obligé d’en arriver là ?», une question en lien avec le drame du 15 octobre, qui visiblement n’a pas plu au maître de séance qui lui a répondu : » on se reverra ». Une réponse qui en dit long pour la suite réservée à Bassirou Sanogo. En effet, il sera convoqué à Ouagadougou. A son arrivée et contre toute attente, il reçoit la visite de deux gendarmes venus l’embarquer. Il sera ensuite mis aux arrêts, puis détenu à la gendarmerie avec d’autres camarades, dont son collègue de Tripoli, Mousbila Sankara.
Entre temps, il reçoit la visite de Djibril Bassolé qui lui demande, s’il était prêt à collaborer avec le nouveau pouvoir. J’ai répondu que: » je souhaitais me reposer. C’était une façon de dire que ça ne m’intéressait pas ». Par la suite poursuit-il, Ils m’ont accusé que j’ai fait jurer aux enfants de Sankara qu’un jour ils vengeront leur père. Pourtant, il n’en est rien. « Quand je suis allé voir Mariam Sankara de retour d’Alger, je n’ai pas vu les enfants », a précisé Bassirou Sanogo.
En outre Il apprendra plus tard, que pendant sa détention, une mission avait été conduite à Alger par le ministre des relations extérieures himself, Jean Marc Palm. Celui-ci, en compagnie du Lieutenant Omar Traoré, aurait défoncé les portes de son bureau et de son appartement en prenant le soin de mettre ses affaires dans le couloir. Toutes ces actions auraient pour but de préparer la venue du nouvel ambassadeur en la personne de Issou Go.
Détenu à la gendarmerie durant six mois et demi, il sera libéré en mai 1988. Ce fut des moments difficiles, dit-il avant d’ajouter que la mort du président du Faso et de ses camarades a été un « véritable gâchis qui a fait reculer le Burkina de plus de 30 ans ».
Une chose dont il est sûr souligne-t-il : » Sankara était la conscience gênante de ceux qui avaient fait la révolution avec lui ».
Par ailleurs, Bassirou Sanogo demeure convaincu que le coup d’Etat du 15 octobre 87 a été préparé de façon « minutieuse » tant au niveau interne qu’au niveau externe , car « une puissance étrangère envisageait de remplacer le numéro 1 par le numéro 2″, parlant de Thomas Sankara et de Blaise Compaoré.
En outre, l’ancien diplomate est certain d’une chose : « Thomas Sankara n’était pas accroché au pouvoir, comme certains tentent à le faire croire, mais il le banalisait».