Ce qui annonce Noël chez les enfants, c’est bel et bien la construction des crèches qui permettaient aux enfants d’exprimer leur talent de « futur architecte ». Mais de nos jours, les crèches « prêt-à-emporter » font de l’ombre aux crèches traditionnelles. A la veille de Noël, nous avons fait un tour de la ville de Ouagadougou pour recueillir le sentiment des vendeurs et clients sur ce revirement de situation.
Paul Ganamtoré est un éducateur à Ouagadougou. Ce matin, il s’est arrêté devant la cathédrale pour se procurer une crèche. « J’ai deux petites filles » dit-il. « C’est difficile pour elles de construire une crèche. En plus, je suis en location et certains bailleurs n’acceptent pas la construction de crèches devant la cours. C’est ce qui m’a obligé à venir payer les crèches préfabriquées pour elles. J’espère avoir ma propre cour pour que mes filles y grandissent et construisent leurs crèches les années à venir », développe-t-il.
Pour Paul, l’achat des crèches pour les enfants est désavantageux. Cela les empêche de développer leurs facultés et de vivre cette joie d’avoir réalisé de leurs mains une merveille ajoute-t-il.
Au même moment, nous rencontrons Me Martin Nikièma, lui aussi est venu avec le même objectif . « Je suis venu payer la crèche préfabriquée parce que mes enfants sont très jeunes et ne sont pas capables d’en fabriquer. « Comme il y a l’urgence, je suis venu en chercher pour eux afin de leur faire plaisir le temps qu’ils grandissent et puissent en construire eux-mêmes. Pour lui, cela lui évitera de dépenser pour les crèches car celle qu’il a pris lui a coûté 7000 FCFA.
Pour Me Nikièma, c’est le manque de temps qui explique que les enfants tout comme leurs parents préfèrent les crèches préfabriquées. « Si les enfants ne sont pas à l’école, ils sont en cours d’appui ou sont à la catéchèse. Avec l’argent, la crèche préfabriquée est accessible en quelques minutes. Par contre les enfants sont devenus paresseux, comparé à notre époque » explique-t-il.
C’est chez Emmanuel Ouédraogo que Me Nikièma a acheté sa crèche. Emmanuel vend des crèches préfabriquées depuis 2010. « On fabrique nos crèches avec du carton, de la granite, de l’amidon et de la colle. Si nous avons choisi de fabriquer les crèches préfabriquées, c’est parce que c’est facile à fabriquer et ça prend moins de temps par rapport aux crèches traditionnelles. » En réalité » dit-il « les enfants ne veulent plus construire des crèches. Ils n’ont pas l’amour des crèches comme à notre temps.
Le marché est lent par rapport à l’an dernier selon Emmanuel Ouédraogo. Il espère néanmoins écouler ses crèches avant la Naissance du Christ.
Tout comme Emmanuel Ouédraogo, Bagagnan Issaka est dans la confection des crèches depuis 24 ans (1994). Il a d’abord commencé par la construction des crèches pour lui-même mais également pour ceux qui en voulaient moyennant une somme d’argent.
Au fil du temps il s’est lancé dans la fabrication des crèches préfabriquées. A l’en croire, il fait parti des pionniers dans le domaine. Il dit avoir formé plusieurs enfants, qui volent de leurs propres ailes. Issaka Bagagnan déplore le désintérêt des enfants vis-à-vis de la construction des crèches dites traditionnelles. « Mais il faut comprendre, le monde n’a pas changé mais les gens et les habitudes ont trop changé et il faut faire avec. Voyez-vous, on rencontre même désormais des maisons préfabriquées« , a renchérit Bagagnan.
Après les crèches en carton, en granite, Issaka Bagagnan est passé dans la fabrication de celles en bois. Ce modèle prend plus de temps dans sa conception. Par contre, il dure plus que ceux en carton et en granite. Et naturellement son prix aussi est plus élevé.
Tout en souhaitant Joyeux Noël à tous, les vendeurs de crèches préfabriquées souhaitent faire de bons chiffres d’affaires d’ici minuit.
Y. Alain Didier Compaoré